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10/06/2011

Pas facile de dénoncer des contrats abusifs

Comment mettre fin aux abus de certains opérateurs (assurance, énergie, télécommunications, vente en ligne) sans se lancer dans des procédures judiciaires longues, coûteuses et incertaines ? Le projet de loi visant à renforcer les droits, la protection et l'information des consommateurs, présenté mercredi 1er juin par le secrétaire d'Etat à la consommation Frédéric Lefebvre, trace plusieurs pistes.

La "class action" ou action de groupe. L'action de groupe à la française autoriserait les consommateurs confrontés à de petits litiges à se regrouper pour mutualiser leurs frais de justice et obtenir réparation.

Elle est réclamée depuis longtemps par l'Union fédérale des consommateurs-Que choisir. Une très large majorité de Français la préconisent, selon cette association. L'UFC-Que choisir a interrogé 56 437 personnes, par courrier et par Internet, entre mi-décembre 2010 et mi-avril. Les résultats de cette enquête indiquent que 95 % des personnes sondées y sont favorables.

Ce n'est pourtant pas la solution qu'a retenue le gouvernement dans le projet de loi du secrétaire d'Etat à la consommation. "J'ai vu les dégâts que cela a pu faire dans les pays qui la pratiquent", a déclaré Frédéric Lefebvre à la presse, en citant les Etats-Unis, où elle aurait coûté "1,5 point du PIB". "Je crois à des sanctions administratives et à des amendes dissuasives, qui permettent de faire cesser le préjudice subi le plus vite possible et qui n'ont pas d'effet négatif sur l'économie", a-t-il insisté.

Une police administrative plus efficace contre les clauses illégales. Le secrétaire d'Etat à la consommation propose de doter la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de pouvoirs de police administrative : cela lui permettrait de mieux lutter contre les clauses illégales des contrats.

La pratique illicite de nombreux opérateurs, qui consiste à faire payer les paiements par chèque, pourrait, par exemple, être désormais sanctionnée. Les consommateurs qui refusent les prélèvements automatiques sur leur compte sont en effet souvent pénalisés. Les opérateurs facturent leurs chèques : 1,50 euro chez SFR, 3 euros chez Direct Energie, et 4 euros chez Free, qui a été condamné par le tribunal d'instance de Paris, le 22 mars, à la suite d'une plainte de l'Union fédérale des consommateurs-Que choisir. Ce tribunal avait déjà condamné Numericable, le 15 septembre 2009, pour avoir facturé les siens 3 euros.

La DGCCRF indique avoir reçu d'innombrables plaintes contre cette pratique interdite par le code monétaire et financier, dont l'article L 112-12 stipule que "le bénéficiaire (d'un paiement) ne peut appliquer de frais pour l'utilisation d'un instrument de paiement donné", comme le chèque, le virement ou la carte bancaire. La direction du ministère de l'économie et des finances ne peut toutefois imposer aux opérateurs de se mettre en conformité avec la loi. "Désormais, elle pourra infliger une amende de 15 000 euros maximum à un opérateur qui ne respectera pas ses injonctions", a précisé M. Lefebvre.

La suppression des clauses abusives par le juge. Le consommateur peut repérer dans un contrat une clause non pas "illégale" au regard du code de la consommation, mais "abusive", c'est-à-dire créant "un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties". C'est, par exemple, le cas d'une clause qui réserverait au professionnel le droit de modifier unilatéralement les engagements de son contrat.

A l'heure actuelle, le consommateur concerné doit aller devant un juge civil pour faire reconnaître la clause comme abusive. Un autre consommateur ayant le même contrat ne peut bénéficier de ce jugement : il doit refaire une procédure, en vertu du principe de l'autorité "relative" de la chose jugée.

Le projet de loi dit que, désormais, la DGCCRF, ou une association de consommateurs agréée, pourra se charger des poursuites et demander au juge d'ordonner la suppression de la clause abusive dans tous les contrats identiques conclus par l'opérateur. Le juge devra dire que la clause abusive est réputée "non écrite".

Une surveillance accrue des contrats de vente en ligne. Le consommateur qui achète en ligne doit aussi se méfier des clauses de certains contrats de vente. Les tribunaux ont déjà jugé abusive, par exemple, la clause qui donne au vendeur la possibilité de modifier à tout moment les termes de son contrat, sans raison valable spécifiée et sans autorisation de l'acheteur.

Ils ont jugé abusive la clause qui interdit à l'acquéreur n'ayant pas formulé de réserves sur un bon de livraison de contester la conformité de sa commande. Comme celle qui prévoit une acceptation implicite par l'abonné des conditions générales du contrat ou celle qui impose à l'abonné de payer à partir d'un compte bancaire situé en France métropolitaine. On peut en retrouver la liste dans l'ouvrage Droit pour non-juristes : Internet (Dunod, 2010) d'Arnaud Dimeglio, avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle.

En mars, le tribunal de grande instance de Paris, saisi par l'UFC-Que choisir, a considéré comme illicite une clause contenue dans les contrats d'abonnement inférieurs à 32 mois de Free, qui impose des "frais d'activation des services, à perception différée" : il a jugé qu'il s'agissait de "frais de résiliation détournés" et a ordonné leur suppression.LEMONDE |

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